·
C'est la préposée aux bénéficiaires qui vous
lave les fesses après une opération.
·
C'est l'infirmière qui vous soutient pendant que
vous vomissez vos tripes après une anesthésie générale et qui vous masse
ensuite la bedaine pour refaire fonctionner vos intestins parce que tant que ça
ne marche pas, dans ce coin-là, vous ne pourrez pas quitter l'hôpital.
·
C'est la concierge qui ramasse sans chialer le
vomi à vos pieds parce que vous n'avez pas réussi à vous rendre aux toilettes à
temps. (Des fois, c'est autre chose qu'elle ramasse et elle le fait également
sans chialer parce qu'elle sait que vous êtes malade et que vous ne l'avez pas
fait exprès.)
·
C'est la technicienne de laboratoire qui analyse
votre biopsie pour savoir si cette nouvelle bosse que vous avez dans le cou cancéreuse
ou non.
·
C'est votre voisine, celle qui va appeler la
police si des gens entrent par effraction dans votre domicile pendant votre
absence.
·
C'est votre cousine, celle qui vous serrera dans
ses bras aux funérailles de votre mère.
·
C'est la comptable qui vous fait économiser de
l'impôt.
·
C'est votre femme de ménage, celle qui lave
votre toilette, vide vos poubelles, frotte votre évier et votre baignoire pour
que vous viviez dans un monde propre, propre, propre.
·
C'est l'éducatrice spécialisée qui s'occupe de
votre petit dernier, celui qui a un grave problème d'apprentissage.
·
C'est la femme qui sert le repas à votre mère au
foyer pour personnes âgées où vous l'avez installée. C'est aussi l'autre, celle qui lui change sa couche.
·
C'est l'étudiante en génie civil qui dessinera
le futur pont Champlain.
·
C'est la prof du secondaire qui, contente de sa
lecture et consciente que le roman est un véritable page turner, le prête à une
élève qui déteste lire. (Oui, oui, j'ai déjà fait ce genre de choses avec un
roman de Reynald Cantin, interdit à l'école où j'enseignais parce qu'il y avait
une scène de viol dedans. Et de la drogue aussi.)
·
C'est l'ado qui déteste lire qui lit le roman au
complet. (Parce que pour développer des compétences en lecture, faut lire.
Quand la jeune est rendue à 16 ans et qu'elle n'a toujours pas lu un livre au
complet, il faut lui donner à lire un roman qui va la toucher, d'une manière ou
d'une autre.)
·
C'est aussi l'ado qui lit à reculons et en
chialant que c'est jamais bon et qui, cette fois, a lu toute la série et
cherche autre chose à se mettre sous la dent. (Parce que pour donner le goût de
la lecture à quelqu'un qui ne l'a pas, il faut y aller avec ses goûts, pas avec
les nôtres.)
On peut juger un livre sur la qualité de l'écriture et/ou sur
le message qu'il véhicule et/ ou sur la présence d'un contenu. Ça dépend de nos
goûts, de nos valeurs et de l'opinion qu'on a de nous même, de nos goûts et de
nos valeurs. (v. billet précédent)
Mais on ne peut pas juger la personne qui lit ledit livre.
Ça la regarde. Elle, et elle seule! Comme la personne avec qui elle couche.
Comme ce qu'elle mange pour dîner. Comme le sport qu'elle fait ou pas. Et comme
la religion qu'elle pratique ou pas.
Un ado, c'est aussi une personne, et la job du prof de
secondaire, ce n'est pas de lui donner une culture classique. Sa job, c'est
d'amener chaque jeune à lire et à comprendre ce qu'il lit et, si le prof est doué
et chanceux, à lui faire aimer la lecture. Seul
le prof peut juger de ce qu'il faut à sa classe. Le prof d'une école privée ou d'une école favorisée
peut aller bien plus loin que le prof d'une école en milieu défavorisé. Et
encore là! Chaque classe est différente parce que chaque élève est différent.
Le temps de la mise à l'index est révolu.
P.-S.: J'ai lu Twilight
pendant mon premier hiver au Yukon. La serveuse du seul restaurant
ouvert achevait sa lecture et m'a prêté son livre. Ben j'avais hâte de me
coucher le soir pour lire parce que Stephenie Meyer sait raconter. Je vais vous dire, le seul bout où j'ai pogné
les nerfs, c'est quand Bella arrive chez son père et que là, le bonhomme
s'écrase devant la TV pendant qu'elle va à l'épicerie, fait le souper, fait la
vaisselle et le ménage. Pour sa relation avec un vampire, j'ai probablement dû
lire pire (ou fait pire, c'est selon) alors je n'ai pas trouvé ça ben ben
scandalisant. Mais c'est vrai que j'ai juste lu le premier tome. Peut-être que
ça s'aggrave par la suite. Je ne le saurai jamais. Parce que si j'ai assez aimé
l'histoire pour finir le tome 1, je ne l'ai pas assez aimée pour lire le
tome2.
P.-P.-P.-S.: L'auteure que je suis s'incline bien bas devant l'auteure qui a réussi à susciter autant de passion (blogue 1 et blogue 2) chez ses lectrices. Qu'on aime ou non, Stephenie Meyer a su toucher quelque chose qui nous reste inaccessible à nous, auteurs ordinaires. N'en déplaise à certains.
Technique de la répétition très efficace. J'ai eu juste peur, au début, que ce ne soit que des femmes du milieu hospitalier!!!
RépondreSupprimerOn voit que certains articles te restent en travers de la gorge, mais ça t'inspire de très bons billets. Percutants.
Moi, je suis en train de lire Lili Klondike (oui, je sais je lis tes livres à l'envers). Étant de la génération qui n'avait pas de livres québécois à lire à l'école primaire (La Courte échelle n'était pas encore née) ni secondaire. Je lis à l'envers: début avec Baudelaire, et maintenant presque exclusivement des livres québécois. Des "populaires" surtout. Hooooonnnnn!
Si j'enseignais encore, je m'efforcerais de trouver des textes qui donnent le goût de lire, de parler, d'écouter et d'écrire.
Ça paraît qu'il y a des textes qui me restent en travers de la gorge? Vraiment? C'est le mépris, le jugement et la liberté qu'on s'octroie mais qu'on refuse à d'autres qui restent pris, je te le jure.
SupprimerOh la belle intensité dans ce texte! C'est beau (et stimulant à lire...) une écrivaine indignée.
SupprimerJ'pense que le problème n'est pas qu'il n'existe pas de chemin "de Twilight à Beaudelaire". Le problème, c'est que la plupart des intervenants du milieu de l'éducation (et même du milieu du livre) ne sont pas formés pour le pointer du doigt aux personnes qui seraient intéressées à l'emprunter.
RépondreSupprimerJe viens d'un milieu populaire. J'ai lu surtout du populaire pendant des années, avant de découvrir, par l'école, que les classiques existaient. Je ne les ai pas aimés d'emblée, loin de là. Mais un moment donné j'ai entendu parler, par hasard, des Trois Mousquetaires, que je connaissais juste sous forme de dessin animé. C'est pas trop pire comme classique les Trois Mousquetaires. Ça se lit bien quand on est habitués au populaire. Et ça pave la voie pour Beaudelaire.
J'pense que par moment les tenants du populaire sont tellement occupés à défendre leur droit d'exister et les tenants des classiques tellement occupés à péter plus haut que le trou que plus personne n'essaie de trouver les voies qui font communiquer ces deux extrêmes.
Pis Twilight, au niveau de la syntaxe ou du vocabulaire, bof, mais au niveau de la technique narrative, scusez-moi pardon, là y'avait du talent! (comme tu dis, c'est un page turner)
Mon problème, Gen, c'est quand on essaie d'imposer à tous l'idée que Baudelaire est essentiel à la vie.
SupprimerDans mon quartier, il n'y a ni bibliothèque ni librairie. Et les gens sortent peu du quartier parce que la majorité n'a pas de voiture. Cette situation a donné lieu à la création cette semaine d'une maisonnette-bibliothèque à quelques rues de chez moi.
http://ici.radio-canada.ca/regions/estrie/2014/10/14/007-inauguration-bibliotheque-mobile-jardins-fleuris-sherbrooke.shtml
Ben je vais te dire. Si ces enfants sont capables de lire un roman de 200 pages en entier à la fin de leur 2e secondaire, on aura accompli quelque chose. Je me fiche éperdument qu'ils lisent ou non Baudelaire ou un autre classique avant la fin de leur secondaire. Je veux qu'ils lisent. Point. Et qu'ils aiment ça. Pis si ça prend des Twilight, des Wariwolf, des Amos d'Aragon, des Aurélie Laflamme pour leur faire aimer la lecture, ben qu'on leur donne.
Je suis d'accord : qu'on leur donne ce qu'il faut pour leur faire aimer la lecture. Mais qu'on les introduise aussi aux classiques. Beaudelaire c'est pas essentiel à la vie, c'est vrai, mais ça peut l'enrichir pas mal.
SupprimerPeut-être que la solution serait de ne pas rendre les lectures de classique obligatoires. De juste en présenter des extraits à l'école. Et de faire lire des romans plus populaires.
Je suis entièrement d'accord avec Gen. J'avoue avoir sursauté en lisant que ce n'était aux profs du secondaire de faire découvrir les classiques... S'ils n'avaient pas été sur ma route, je ne les aies aurait pas découverts! Faire lire des classiques complets, non, c'est vrai, tout à fait d'accord, le style n'est plus fait pour aujourd'hui et il faut du talent de la part du prof pour savoir introduire adroitement un texte qui date de plus d'un siècle. Il y a tellement eu de nouvellistes à cette époque que l'on peut facilement tremper dans leur oeuvre pour faire découvrir aux élèves. S'ils n'aiment pas ensuite, aucun problème! Même chose pour la poésie, on peut leur faire lire un poème, pas nécessaire de leur faire lire tout un recueil! Non, les classiques ne sont pas nécessaire à la vie, mais grâce à eux, on peut découvrir tout un univers par contre.
SupprimerQuand aux lectures obligatoires à l'école... Ouf! C'est un vaste dossier. Donner le goût de lire aux jeunes, c'est certain, leur transmettre une certaine base culturelle également (à eux de décider ensuite s'ils y adhère ou non!), développer leurs capacités en compréhension de l'écrit... Ça fait beaucoup! Je crois que ça mériterait un billet complet de ta part.
Au fait, j'ai beaucoup aimé les Twilight... Mon préféré étant de très loin, le dernier tome de la série! J'ajouterais à ta liste de gens qui l'ont lu des médecins, des avocats, des notaires, bref, des gens de toutes les origines... y compris des libraires! (je le sais, j'en étais une à l'époque! ;) )
Moi j'ai tout lu les Twilight, parce que j'aime bien juger par moi-même de la qualité d'un roman au lieu d'écouter les pour et les contre. J'avais été renversée par les romans d'Harry Potter. Twilight m'a fascinée pour le premier roman (beaucoup de charme et de sensualité bien exploités), mais le deuxième est très (trop) long pour moi, trop repétitif. J'y cherchais en vain la sensualité du premier, l'attirance, mais je ne l'ai pas trouvée. J'ai quand même fini les 4, ce n'était pas si mal comme lecture. Mais c'est mon opinion. Et je ne juge pas ceux qui adorent, au contraire: ils ont lu toutes ces briques, c'est hot! ;)
RépondreSupprimerCinquante nuances de Grey a aussi fait partie de mes essais, mais je n'ai pu me rendre plus loin qu'une centaine de pages. Je n'en pouvais plus de relire le contrat, les redites et aussi les commentaires d'Anna (OMG, he's so hot!) sur Christian. Il manquait de travail éditorial entre la fanfic (qui doit nécessairement répéter des éléments pour les lecteurs qui s'ajoutent à chaque chapitre) et le roman.
Mais ça aussi, c'est mon opinion. Et je ne peux encore moins dire si c'est bon, je n'ai jamais terminé!
Hi! Hi! J'ai lu moins de 70 pages dans 50 nuances de Grey. Pas capable. Mais je connais plein de femmes qui ont dévoré la série. Tous les goûts sont dans la nature. Pis une chance! Sinon, on chercherait toutes un Christian Grey. ;-)
SupprimerJe me suis forcée à finir Cinquante nuances de Grey... J'en avais marre à la page 50 à peu près. -_- Dieu que c'est répétitif!
SupprimerJe comparerais cela (excusez-moi) aux Chevaliers d'Émeraude, pour notre version québécoise. J'avais déjà lu un billet sur un blog la-dessus il y a longtemps (N'était-ce pas sur l'ancien blog de la sorcière?)
RépondreSupprimerCe n'est peut-être pas, niveau écriture et construction des personnages, l'histoire la plus épatante de ma collection, mais c'est la série qui m'a fait recommencer à lire, moi qui avait arrêté. Depuis je lis toujours, et je juge de bien haut la qualité des Chevaliers d'Émeraude. Pourtant, ils siègent toujours sur mes tablettes, ils méritent leur place juste parce qu'ils sont le début du recommencement.
Et ils en ont fait lire en SAPRISTI, des québécois et québécoises de mon âge.
(Oui, j'ai aussi lu Twilight.)